You're gonna lose that girl

It’s 2007. You see her at work. Fall in love instantly. You work hard to have her fall in love with you. Then you live together. You have fun. You have friends. You travel to the end of the world. You climb mountains in the Andes and New Zealand. You have a beautiful daughter. You move back to your country. You have a boy now. Two amazing kids. You would do anything for them. You buy an apartment. Finally you have a home. A real home, this safe place from your childhood, in which your family lives, the people you love the most. You dream of so much more. It has been thirteen years and you still love this woman. You love her your own way of course. The wrong way, probably.

And one day [11 January 2020, approximately 11pm] in two minutes flat everything that was precious to you is vaporized with two phrases. It’s over. It was just an illusion. You lived for something that in fact didn’t exist. It is like removing your bones while you are still alive. You cannot stand. You try to protest, you try to argue, but you cannot move, you’re just a grotesque and dislocated piece of slimy flesh on the ground.

The pain. The loneliness. The fear. The culpability. When does it stop ? When does it fucking stop?


Flatterie

Guillermito, scientifique raté, Septembre 1996, "Dix vérités essentielles", en mauvais français, ici-même sur le web, 7 visiteurs:




Corinne Maier, psy et écrivain à succès, Avril 2004, "Bonjour paresse : De l'art et de la nécessité d'en faire le moins possible en entreprise", traduit en 25 langues, Ed. Michalon, 500.000 livres vendus d'après Wikipedia:


Maïa, ma fille.

Plus rien ne sera jamais comme avant. Le 14 Octobre 2011, a 5:40 du matin, notre fille Maïa est née. La deuxième phase de ma vie commence. Je peux enfin aller dans les magasins de jouets sans avoir honte.

NB : Maïa est une jeune étoile des Pléiades, la plus belle de toutes.


[Image Copyright ESA / NASA / Hubble / Danny LaCrue]

Manu Chao amniotique

Un concert de Manu Chao, c'est la certitude que la vie suit son cours normal, que cette réalité est bien la mienne. C'est comme se pincer pour être sûr de ne pas rêver. Ca remet les idées en place. C'est un lien fort avec le passé, qui rassure sur la continuité du temps. C'est le tic-tac de l'horloge du salon. Mes premiers concerts des Carayos vers 1988. Puis la Mano Negra une douzaine de fois dans les années qui ont suivi, autour de Montpellier et à Madrid. Jusqu'à ce concert magique sur la plage de la Gardiole, quand la Mano n'existait déjà plus. Enfin, le chanteur en solo, plus rarement parce qu'aux US, mais quand même trois ou quatre fois. Je ne m'en lasse pas. Toujours cette énergie considérable, même avec un accompagnement réduit au minimum (Madjid, Gambit, Garbancito) et sans cuivre.

 

 

Un concert de Manu Chao, c'est se dire que, malgré les changements, malgré la perte des illusions, malgré l'incertitude quant à l'avenir, on reste fidèle a soi-meme. Non, je ne serai pas chercheur au CNRS, comme je le voulais depuis que je suis enfant. Quelle importance ? Je n'ai qu'à m'inventer un nouveau métier. Oui, je vais être parent. C'est terrifiant, mais c'est aussi une aventure de longue haleine incroyablement excitante.

 

Pour la première fois, j'ai ecouté ce concert assis, depuis un balcon spécialement isolé et surplombant la scène, car les américains sont prévenants et efficaces lorsqu'il s'agit de la sécurité d'une femme enceinte (et de celui qui l'accompagne). Et donc, ma fille d'age encore négatif a entendu son premier concert de rock depuis la douceur amniotique, et c'était Manu Chao. Un bon début dans la vie.

Future Father Blues

Je m'imaginais une vie linéaire, sans regard en arrière et sans retour, jamais. Partir, me développer en tant qu'être humain, dans d'autres pays, et mourir très loin de là ou je suis né. Ne surtout pas revenir au point de départ, qu'il soit géographique, familial, ou émotionnel. J'ai toujours eu peur des grands cycles de vie. Quand tout finit et tout recommence, une génération plus tard. Ces gens qui rentrent pour fonder une famille et faire le même métier que leurs parents. Dans le même village. Pour eux, le nouveau cycle représente sans doute la joie d'un début plein de promesses. Je n'y vois qu'une fin. Je n'y vois qu'une triste et prévisible servitude, un piège qu'il me fallait éviter. Je voulais embrasser la futilité et l'absurdité insignifiante de cette vie éphémère, être libre et me détacher de la pesanteur des générations, de la tyrannie génétique du temps qui recommence. Ne pas faire comme ceux d'avant ou ceux d'après. Sortir du cycle, définir ma propre tangente.

Mais la vie, évidemment, se charge de transformer en confettis vos certitudes les plus ancrées. Dans six mois, si tout va bien, je vais devenir père. On me parle de félicitations, d'excitation, de bonheur, de futur. Oui, bien sûr. Pourtant, j'ai cette angoisse souterraine et douloureuse que ma vie est en train de se terminer. Le cycle m'emporte dans son tourbillon implacable. J'ai été enfant, mes parents se sont bien occupés de moi, m'ont élevé, et maintenant tout recommence, mais le parent, c'est moi. Juste un petit glissement des rôles. La différence étant que dorénavant, je sens confusément que ma vie n'a plus vraiment d'importance. Je n'ai plus qu'une raison d'être. Chaque matin des vingt prochaines années, je me réveillerai en pensant à mon enfant. Est-il en bonne santé ? Est-il dans un endroit sûr? Est-il heureux ? Est-il armé pour la vie ? Chaque soir je me coucherai en me posant les mêmes questions. Ma propre vie deviendra accessoire, mon propre bonheur sera secondaire.

Je voulais parcourir les anciens chemins Incas, de l'Equateur au Chili, voir de mes yeux les lamas en pierre blanche de Choquequirao, escalader le Cotopaxi et le Licancabur, éviter les ours polaires et faire face à l'immense verticalité du Mont Thor sur l'île de Baffin, apprendre l'Aymara et le Quechua, traverser le Pacifique en voilier sur les traces de Joshua Slocum et Bernard Moitessier, me tenir sur le bord du Mont Roraima et regarder la jungle infinie à mes pieds, pagayer dans le canal de Beagle, faire pousser des salades au Pôle Sud pendant les huit mois d'hiver en isolation absolue, apprendre à plonger, à piloter un avion, un deltaplane, un parapente, un ULM, n'importe quoi qui puisse m'emporter dans le vent, me libérer de la gravité, cet autre tyran impitoyable. Monter une ONG, partir deux ans en Bolivie, écrire un livre, voir les Montagnes de la Lune du Ruwenzori, le Sahara et la Grande Vallée du Rift Africain d'où nous sommes tous partis, prendre une cuite dans un bar de La Paz.

Je ne ferai rien de tout cela. J'ai fait mon temps, il fallait en profiter avant. C'est trop tard. Ma vie d'homme libre se finit. Ma vie se finit. Je m'efface silencieusement, et je laisse place à la nouvelle génération.

Le prochain qui me dit "Félicitations !", je lui en colle une.

Tiersen without Tiersen

We went to see Yann Tiersen in New York yesterday night.

Nine hours of bus for a major disappointment. The concert was very, very, very bad. Apparently Tiersen, a master of moody, intimate and subtly minimalistic acoustic melodies, decided to go electric and more rock'n'roll, or whatever passes for rock these days. I understand that artists want to reinvent themselves and are bored with always playing the same things, but please do not do that during a tour in a faraway country where, obviously, people will see you for the first time, and essentially want to hear what you are famous for.

I'm not even against being loud and electric. I love the Ramones for example, and other punk bands. What I don't like is when people forget about melody.

With the exception of his "Sur le Fil" amazingly wild violin solo and maybe one song with a Gretsch-looking semi-acoustic guitar, the concert, for me, was a disaster. The female singer could not be heard at all, all subtlety was lost in the sound of saturated guitars. Most of the songs were made into a simple crescendo, ending very loud in a guitar strumming frenzy that I thought even high-school bands didn't do anymore, and then stopping abruptly. I love Yann Tiersen music because it's all about melody, not volume. Also, having all six musicians sing at the same time obviously destroys the intimate side of songs and lyrics (which I couldn't hear anyway).

A contrarian point of view was brought in by Miss C., who was not thrilled but nevertheless liked the concert. The difference is that she saw Tiersen in concert three times before in France, doing his typical acoustic style, and it was the first time she saw him with an electric guitar in hands. So, for her, the loud and dirty rock'n'roll style was something new. But I wonder if she can be objective : she is from Brittany, and yesterday night there were some people screaming "Vive la Bretagne !" during the set, and even a black and white flag from the region right in from of the stage.

That is genuinely funny to hear that sort of franco-french babble in New York City, of course. But anyway, the Languedoc flag is much more beautiful.

Other points of view with pictures here, here, and here.

 

Finally

Tonight, the United States of America finally enters the twenty-first century. It may become again this great country it once was, a country that inspires dreams and hope for a better future, not fear, hate and war.

Today I vote with my t-shirt.

Processus d'extinction synaptique

Pendant quelque temps, les souvenirs se découpent avec une netteté minérale sur l'horizon plus ou moins flou de la mémoire générale. La douleur aigûe due a la séparation proche et au deuil de certains rêves aident a maintenir cette précision. Parce que l'on approche le vrai sens des deux mots "plus jamais", on fait un effort conscient pour se souvenir, comme si on serrait de toutes nos forces notre mémoire pour l'empêcher de s'éloigner. On peut se rappeler de détails extrêmement fins et presque impossibles a vraiment décrire avec des mots, de gestes anecdotiques hier encore, et qui soudainement prennent une charge émotionnelle énorme. Une manière de bouger ses doigts, un coin de bouche juste avant que le sourire n'apparaisse, une façon spéciale et curieuse de prononcer un mot particulier, les gestes avec lesquels elle laçait ses chaussures au matin, des phrases entières extraites de conversations à deux.

Avec le temps et la disparition physique des traces de l'autre, la mémoire s'émousse doucement. On égare des photos, on casse les verres achetés ensemble, on découvre seul des musiques nouvelles. On rencontre d'autres personnes, peut-être, un jour. L'oubli dépose sa chape nuageuse sur notre passé. Au détour d'une conversation, on se demande si tel ou tel voyage commun avait été fait en juin ou en septembre. Comment s'appelait ce livre qu'elle aimait tant. Le son de sa voix. Le cerveau humain est une belle machine biologique, l'érosion continuelle des souvenirs trop saillants est sans doute un simple mécanisme de survie. Les images s'estompent progressivement, les visages deviennent flous quand on essaie de s'en souvenir. Les quelques photos conservées sont trop figées, trop usées, trop regardées, ce ne sont plus des vraies personnes qu'elles représentent, mais des icônes, des statues qui ne signifient plus rien. Malgré nos efforts, des pans entiers de nos relations passées disparaissent. Jour apres jour. On n'y peut rien. Ces moments magiques qui semblaient si précieux, si inoubliables, se fractionnent lentement en minuscules fragments de plus en plus opaques. Comme de vulgaires morceaux de plastique qui se tordent et fondent dans l'oubli. De notre passé ne restent plus que de vagues fantômes imprécis.

Et un jour on se demande : "C'était quoi, son prénom, déjà ?".

Je déteste le mois de février.

No hay lugar

Los placeres y dulzores
de esta vida trabajada
que tenemos,

no son sino corredores,
y la muerte, la celada
en que caemos.

No mirando a nuestro daño,
corremos a rienda suelta
sin parar;

desque vemos el engaño
y queremos dar la vuelta,
no hay lugar.

Jorge Manrique
"Coplas por la muerte de su padre"
XVth century

The Last Town Chorus

Wow. A long time I don't write anything here. Maybe at last I find it more interesting to live my life, instead of writing about it.

I saw The Last Town Chorus yesterday night, at the Lizard Lounge in Cambridge. It's a band from Brooklyn. The singer plays a lap steel guitar, a curious instrument that can produce strange, moody, dreamy sounds, and suddenly switch to a powerful melodic riff. She has a wonderful voice as well. Maybe it was the beer, but at one point I felt that these metallic slide guitar progressions, with a bit of reverberation, reminded me of the underwater recording of whales. A distorted sound that deeply resonates inside. That is maybe why some people wrote that her music has "an aquatic feeling".

The song "Oregon" from her first album can almost bring me to tears. I think it was the first song I ever heard from the band a few years ago, and it made quite an impression. The cover of Bowie's "Modern Love" is also a nice way to discover The Last Town Chorus. Go buy her two albums now. It's a unique sound and you won't regret it. You can follow the links here.

Plus, she is very nice, and I had the pleasure to talk for a minute with her after the show. And she even wrote a few funny french words on my CD.

Somehow I would love to see the video artists from La Blogotheque and their amazing Takeaway Shows do something with The Last Town Chorus. The video clip of Sufjan Stevens doing a cover of a beautiful Innocence Mission song, on some windy roof, will never cease to amaze me.

Sevrages

Le couple de collègues coréens qui me servent de voisins de laboratoire est en train de s'engueuler copieusement face à un congélateur. Ils sont pourtant très calmes, habituellement. Ils sortent un tube d'ADN, se lancent à tour de rôle deux ou trois invectives dont je ne comprends pas un mot mais qui sonnent de manière très curieuse, comme une bande-son montée à l'envers puis accélérée, reposent le tube, en sortent un autre, continuent de se disputer pour une raison inconnue. Je ne comprends rien. Généralement ils parlent en anglais entre eux. Ce bruit de fond m'empêche de me concentrer.

Aujourd'hui, j'arrête de fumer. D'un coup. Après quinze ans à un paquet par jour. J'ai décidé ça en un quart de seconde, il y a quelques semaines, sur un coup de tête, comme d'habitude, pour accompagner quelqu'un qui fait la même chose. Les gens importants vous font prendre des décisions importantes. Il n'y a pas besoin de réfléchir longtemps.

J'ai fumé ma dernière cigarette hier soir, à quatre heures du matin. Je me suis obligé à quasiment finir mon paquet acheté à peine quelques heures plus tôt. Clope sur clope avant d'aller me coucher, jusqu'a la nausée et l'envie de vomir. Ca fait six heures que je n'ai pas fumé. Je suis déjà un peu nerveux.

J'ai dormi à peine deux heures. Je regardais dans l'obscurité l'économiseur d'écran hypnotique de mon ordinateur posé à côté de mon lit et, d'une façon un peu stupide, j'attendais avec angoisse que mon corps m'annonce les premiers signes du manque. Qui ne sont évidemment pas venus, étant donné toutes les cigarettes que je m'étais envoyé quelques minutes avant. Il s'est alors passé une chose un peu étrange. La simple peur de ressentir physiquement l'absence de nicotine a ramené à la surface des plaies enterrées et quasiment oubliées, quand j'ai manqué d'autres choses. Des gens dont je savais que je ne les reverrais plus jamais. Des espoirs envolés, des rêves brisés, des avenirs qui n'ont jamais existé, des histoires d'amour terminées. Une onde de tristesse m'a traversé comme un petit tsunami mental. Et puis je me suis endormi.

En me levant après cette courte nuit sans rêve, curieusement, j'étais en pleine forme. Comme nettoyé intérieurement. J'ai collé sur ma peau mon premier patch de nicotine. En espérant que cette camisole pharmaceutique, cette béquille chimique aidera ma volonté déficiente et mon absence totale d'auto-discipline, et repoussera les marées noires surgies de ma mémoire.

Faire croire que je suis fort. L'histoire de ma vie, en somme.

Guillermito Zone
 
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